Le Cercle Guimard vous propose une nouvelle date de visite guidée et commentée dans le nouveau Paris de 1900 sur les pas d’Hector Guimard et à la découverte de façades caractéristiques de la période 1900.
Dimanche 7 avril à 15h
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Date / Heure | Événement | Places disponibles |
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sam 14/09/2024 / 10:00 | Visite guidée « Paris et l'architecture du commerce : des galeries aux grands magasins » | 5 |
dim 15/09/2024 / 10:00 | Visite guidée «Guimard et le métro» | 14 |
Après avoir expliqué la raison du déport vers l’extérieur de la console postérieure droite[1] de l’édicule A à claire-voie de la station Abbesses, nous allons examiner une seconde anomalie présente sur cet édicule et qui va renforcer la visibilité de ce défaut de soutien du chéneau. Pour bien la comprendre, il faut se remémorer la façon dont l’eau pluviale y est collectée.
La toiture d’un édicule peut relever de deux fonctions différentes. Tout d’abord apporter de l’ombre. Cependant, dans le cas particulier des édicules du métro, l’ombre n’est pas recherchée pour des utilisateurs qui ne font qu’un bref passage sous la toiture. Au contraire, il est important que l’escalier soit bien éclairé et c’est pour cette raison que les édicules ont été couverts de verre. La seconde fonction d’un édicule est de protéger de la pluie et c’est bien cette fonction qui a été clairement recherchée et mise en avant par la Commission du métropolitain et la CMP. On retrouve en effet dans différents articles de presse et dans les rapports de la Commission du métropolitain de nombreuses mentions de la volonté des autorités de placer le voyageur à l’abri de la pluie (et du verglas en hiver) lorsqu’il descend les escaliers des accès du métro[2]. On craint également que, sans toiture au dessus de la trémie, l’eau des orages n’envahisse la salle des billets[3] située en contrebas. Pour chacun des deux modèles d’édicules, Guimard a non seulement apporté une solution élégante à la collecte des eaux pluviales, mais celle ci a dirigé ses plans.
Pour l’édicule B, en relevant de toute part la toiture, Guimard collecte la pluie dans un chéneau central puis la dirige à l’intérieur du pilier postérieur et enfin dans un regard d’égout, évitant ainsi le ruissellement en bord de toiture.
Pour l’édicule A, le choix d’une toiture à deux pans et croupe postérieure, l’oblige à prévoir des chéneaux sur le pourtour des faces latérales et postérieure. Ces chéneaux sont constitués d’éléments articulés en fonte, fabriqués par la fonderie meusienne Bigot-Renaux, spécialisée dans cet article et qui éditera la presque totalité des différents modèles de chéneaux conçus par Guimard depuis le Castel Béranger.
L’eau de ces chéneaux s’écoule de l’arrière vers l’avant de l’édicule, passe par une cuvette[4] placée aux extrémités gauche et droite, puis rejoint par un tuyau coudé le fût des piliers antérieurs qui sont creux. À l’avant de l’édicule, la marquise relevée envoie l’eau dans un chéneau arqué qui la conduit également aux extrémités supérieures des piliers antérieurs avant qu’elle ne s’écoule au sol par des trous ménagés à la base des piliers.
Un détail d’une photographie ancienne de l’édicule A de la station rue de Reuilly montre que sur cet édicule, ce circuit d’écoulement des eaux vers les piliers antérieurs est respecté. Il y a bien continuité entre le chéneau latéral et la cuvette qui le poursuit vers l’avant.
En revanche si l’on scrute l’écoulement de l’eau au même endroit sur l’édicule de la station Abbesses, on a la surprise de voir que le chéneau et la cuvette sont disjoints mais reliés par un petit tuyau coudé banal (sans mouluration Guimard).
La même anomalie se devine sur l’édicule de la station Saint-Paul où l’on voit que le chéneau et la cuvette sont également disjoints.
La complexification de ce circuit est due au fait que le chéneau latéral qui se trouvait initialement écarté du linteau en a été à la fois rapproché et remonté. Cette intervention, qui a entraîné le raccourcissement des fers soutenant le chéneau, répond forcément à une nécessité que nous ne connaissons pas précisément mais qui pourrait être un mauvais passage de l’eau de la toiture vitrée au chéneau.
Aux angles postérieurs, le rapprochement du chéneau latéral est rendu visible par son raccord assez inharmonieux avec le chéneau postérieur.
Ce raccord inesthétique n’existe pas sur l’édicule de la station Rue de Reuilly puisque le chéneau latéral est ici écarté du linteau.
Du côté droit, cet écartement du chéneau masque partiellement le débord de la console postérieure droite que nous avons signalé plus haut.
Le fait que le rapprochement des chéneaux latéraux ait existé sur l’édicule A de la station Saint-Paul montre qu’il s’agit d’une modification effectuée avant la Première Guerre mondiale. Malgré son caractère de « bricolage » elle doit être prise en considération lors de futures restaurations de l’édicule A à claire-voie de la station Abbesses. Il faudra alors décider ou non de revenir à la conception originelle de Guimard, tout en s’assurant que le recueil des eaux de pluies se fasse correctement.
F. D.
[1] Dans tous les articles concernant le métro de Guimard, nous utilisons les termes « gauche » et « droit » en faisant référence au coté qui perçu par l’observateur situé en face de l’accès de métro.
[2] « Si le grand Manitou de l’Univers laissait faire nos édiles nationalistes la Terre ne tarderait pas à tourner dans l’autre sens. Deux d’entre eux, MM. Fortin et Quentin-Bauchard (livrons leurs noms à la postérité) ont imaginés de ne pas mettre de toit sur les gares du Métropolitain de Paris dans leurs circonscriptions, d’où inondation et cascades souterraines, en attendant les dangereuses glissades d’hiver (…) » Georges Bans, La Critique, 5 août 1900. Le journaliste Georges Bans est en relation amicale avec Guimard et lui sert de relais pour exprimer son mécontentement de voir le programme des édicules réduit à la portion congrue. Deux mois plus tard, en octobre 1900, il signera un bel article consacré aux nouveaux accès du métro de Paris dans la revue l’Art Décoratif.
[3] Le 16 janvier 1902, la CMP demande à l’administration l’agrément des entourages découverts à fond rond de Guimard pour la future ligne n° 2. Dans sa notice, le directeur des travaux revient une nouvelle fois sur la question de la pluie et des entourages découverts : « Le principe des accès découverts a été imposé par le Conseil municipal pour des motifs d’esthétique. Au premier abord, la Compagnie ne l’avait accepté qu’avec hésitation ; elle craignait que l’escalier découvert ne prît un aspect fâcheux en temps de pluie, et surtout que les pluies d’orage ne pénétrassent dans la salle de distribution de la station. Aussi demanda-t-elle à plusieurs reprises, dans l’intérêt du public, que le Conseil municipal revînt sur les décisions prises en ce sens. La Compagnie doit reconnaître aujourd’hui que ses appréhensions étaient mal fondées, et que les inconvénients qu’elle redoutait peuvent facilement être évités sans que la couverture de l’escalier s’impose. »
[4] Contrairement à ce que nous avions écrit dans le livre Guimard, L’Art nouveau du métro, les deux cuvettes sont identiques.
Cet article reprend et complète un aspect traité dans le livre Guimard L’Art nouveau du métro, paru en 2012 aux éditions La Vie du Rail.
La rapidité avec laquelle Hector Guimard a mis au point, pour les entourages découverts du métro, un système à la fois techniquement et stylistiquement novateur est assez étonnante. Cependant, comme toute œuvre humaine, le travail de Guimard recèle quelques défauts qu’il n’est pas cruel de mettre en lumière car leur existence même nous renseigne sur l’état de fébrilité dans lequel a dû se dérouler la conception des accès du métro de Paris.
Ces défauts repérés sont essentiellement au nombre de trois : la trop grande fragilité de la fixation du porte-enseigne, le problème de l’accrochage des écussons sur la balustrade et l’erreur d’orientation d’une console de pilier arrière que nous développerons ici. Ce défaut est couplé à une modification du circuit d’écoulement des eaux pluviales de l’édicule A que nous examinerons dans la seconde partie de l’article.
L’édicule A est indubitablement d’une conception moins audacieuse que celle de l’édicule B dont le fond arrondi et la toiture inversée soutenue par trois piliers séduisent immédiatement. Il est classiquement conçu avec une toiture à deux pans avec croupe à l’arrière, reposant sur un volume parallélépipédique. Néanmoins, sa grande marquise relevée, arrondie et légèrement cintrée lui confère une allure certaine. Dès que l’on s’en approche, on constate que le modelage de Guimard enrobe et transforme ces volumes simples en une structure arborescente où les différents plans sont reliés entre eux, notamment par une multitude de consoles.
Contrairement à l’édicule B dont les plans sont adoptés dès leur présentation, l’édicule A sera sans aucun doute le type d’accès du métro créé par Guimard qui rencontrera le plus de difficultés dans sa mise en place. Ses plans initiaux subissent très certainement des critiques lors de leur présentation à l’autorité préfectorale le 16 février 1900. Ce rejet entraîne des modifications visibles sur une seconde série de plans datée d’août 1900, date plutôt tardive alors que la ligne 1 est déjà inaugurée depuis un mois et que les édicules B ont commencé à être implantés à partir du mois de juillet[1]. Les dimensions sont légèrement modifiées et la marquise reçoit à présent un décor plus conséquent sur son pourtour comprenant le blason de la ville de Paris en son centre[2].
Parallèlement à ce retard, le programme initial d’accès établi par la commission du métropolitain et qui comprenait essentiellement des édicules est en bonne partie démantelée par l’action résolue de deux conseillers municipaux issus des « beaux quartiers ». Charles Fortin et Maurice Quentin-Bauchart, bataillent en effet sans relâche depuis mai 1899 pour faire remplacer ces édicules par des entourages découverts. Sur une soixantaine initialement prévus, leur nombre va en effet chuter à seulement 13. Le modèle A souffrira plus particulièrement de ce changement de politique. Prévu en mars 1900 sur sept accès, il ne sera finalement installé que sur deux d’entre eux : à la station Saint-Paul et à la station Rue de Reuilly (actuellement Reuilly-Diderot).
Curieusement, alors qu’elle avait tout intérêt à réaliser une importante économie avec leur remplacement par des entourages découverts, la CMP semble avoir eu un certain attachement pour son programme d’édicules. Pour preuve, en réponse au projet de supprimer les cinq autres édicules A prévus sur l’avenue Kléber, la place du Trocadéro et la place Victor-Hugo, la CMP fait étudier à Guimard une proposition alternative d’édicule A à claire-voie.
Grâce à la similitude de conception entre les entourages et les édicules, Guimard peut facilement présenter en juillet 1900 (un mois avant la seconde série de plans de l’édicule A) des plans pour un « projet de couverture pour les entourages carrés ». En remplaçant les panneaux de lave et les vitres de l’édicule A par des balustrades à écussons, Guimard supprime l’obstacle visuel des parois et obtient un effet de légèreté saisissant. Mais quelques mois plus tard, la délibération du conseil municipal du 16 novembre 1900 écarte définitivement l’installation d’édicules sur l’avenue Kléber, la place Victor-Hugo et la place du Trocadéro. Malgré tout, cet édicule A à claire-voie sera installé à la station Hôtel de Ville.
Il restera à la station Hôtel de Ville jusqu’au début des années 1970, date à laquelle la construction d’un parking souterrain impose de son démontage[3]. C’est la station Abbesses, sur la butte Montmartre, qui est choisie pour sa réinstallation en 1974. Depuis la destruction des deux édicules A, celui de la station Saint-Paul en 1922 à la suite d’un bombardement allemand en avril 1918 et celui de la station Rue de Reuilly en 1928, il est le seul témoin subsistant de ce modèle d’accès. Idéalement situé dans un lieu touristique, il est devenu une véritable icône parisienne dont l’image accueille les voyageurs à l’aéroport de Roissy et figure en couverture de nombreux guides touristiques[4].
Lors de nos visites à Montmartre pour y effectuer des reportages photographiques, nous avons rapidement repéré un curieux décalage entre la console d’angle postérieure droite[5] et le chéneau qu’elle doit soutenir.
Alors que la console postérieure gauche soutient parfaitement le chéneau.
Confiant dans la perfection de notre architecte favori nous avons alors attribué cette anomalie à un défaut de remontage commis lors de la réinstallation de cet édicule sur la place des Abbesses.
Cependant, nous avons constaté que la même anomalie pouvait être retrouvée sur des photographies anciennes alors que l’édicule se trouvait encore à la station Hôtel de Ville.
Les photographies anciennes disponibles des deux autres édicules A (à paroi en lave émaillée) sont plus difficiles à interpréter. Pour l’édicule de la station Saint-Paul, il n’est actuellement pas possible de visualiser correctement l’angle postérieur droit.
Pour l’édicule de la station Rue de Reuilly, il semble que la console postérieure droite soit également déportée vers l’extérieur, mais sans doute dans une moindre proportion qu’à Hôtel de Ville. Nous apporterons dans notre second article un éclaircissement à cet état de fait.
Pour expliquer que la console postérieure gauche soit parfaitement située sous l’angle du chéneau à gauche, alors que la console postérieure droite ne l’est pas, il faut s’intéresser à la façon dont Guimard a conçu les piliers arrière en fonte et leurs consoles en cherchant à réemployer des éléments. En réalité, ces deux piliers postérieur sont identiques et Guimard les utilise indifféremment à gauche et à droite en les faisant pivoter tout simplement d’un quart de tour, de la même manière qu’il se servirait d’une simple cornière d’angle. Et comme leur décors latéraux sont différents, le décor de la face postérieure de l’un devient le décor de la face latérale de l’autre (et inversement). L’extrémité supérieure des piliers reçoit trois consoles en fonte qui s’insèrent dans un trou ménagé dans le fût et y sont vissées. Deux des consoles, celles qui sont placées à angle droit (V-74, bleue et rouge sur le dessin) sont identiques entre elles et viennent s’appliquer sous les linteaux latéraux et postérieur joignant les piliers. Là encore, la rotation du pilier d’un quart de tour fait que la console latérale devient la console postérieure (et inversement). La troisième console (V-73, verte sur le dessin) vient soutenir le chéneau collectant les eaux de pluie de la toiture.
Comme le chéneau arrière est beaucoup plus large que les chéneaux latéraux, en modelant le pilier et la console d’angle postérieure gauche, Guimard donne à cette console une inclinaison vers le centre pour que son extrémité vienne soutenir convenablement l’angle du chéneau gauche.
Mais quand il modèle la console de l’angle postérieur droit, dans sa volonté de standardiser, Guimard la crée à l’identique de la console de l’angle postérieur gauche (tout en lui donnant pourtant un décor légèrement différent). Et comme l’angle de son insertion dans le fût n’a pas été modifié, son extrémité se trouve, cette fois, déportée vers l’extérieur et ne peut plus venir soutenir l’angle du chéneau droit que de façon imparfaite.
À suivre…
F. D.
[1] Au vu d’un entrefilet du journaliste Georges Bans paru dans la revue La Critique, la date d’implantation des édicules B que nous avions estimé avoir débuté aux environs d’août 1900, doit être un peu avancée.
[2] On est surpris par le décalage entre les décors présentés sur tous ces plans (édicules A et B) et ceux qui seront effectivement réalisés. Si à la fin juillet 1900, des édicules B sont déjà implantés sur la voie publique, cela signifie que le modelage définitif de leurs pièces en fonte a été effectué plusieurs mois auparavant. Or tous ces plans ne semblent pas tenir compte des directions qui ont été prises et reprennent pendant plusieurs mois des options décoratives qui ont été écartées. Il ne faut donc probablement pas les voir comme des documents contractuels mais plutôt comme des esquisses qui ont subsisté dans les archives de la RATP alors que les plans d’exécution ont été perdus depuis longtemps à la fonderie du Val d’Osne à Sommevoire.
[3] Et non de sa destruction puisqu’il est alors protégé depuis 1965 par une inscription à l’inventaire supplémentaires des monuments historiques.
[4] Cf. l’article d’Emilie Dominey. https://www.lecercleguimard.fr/fr/nos-actions/le-cercle-guimard-aide-les-etudiants/etude-de-la-station-abbesses
[5] Dans tous les articles concernant le métro de Guimard, nous utilisons les termes « gauche » et « droit » en faisant référence au coté qui perçu par l’observateur situé en face de l’accès de métro.
Cet article développe et corrige un aspect traité dans le livre Guimard l’Art nouveau du métro, paru en 2012 aux éditions La Vie du Rail.
La rapidité avec laquelle Hector Guimard a mis au point pour les entourages découverts du métro un système à la fois techniquement et stylistiquement novateur est assez étonnante. Même si nous le soupçonnons d’avoir, pendant que ses confrères concouraient pour ne remporter aucun marché, secrètement préparé ses plans à l’avance afin de les dévoiler au moment opportun, on reste confondu par un tel déploiement d’inventivité et une telle coordination dans l’utilisation des matériaux.
Cependant, comme toute œuvre humaine, le travail de Guimard recèle quelques défauts qu’il n’est pas cruel de mettre en lumière car leur existence même nous renseigne sur l’état de fébrilité dans lequel a dû se dérouler la conception des accès du métro de Paris.
Ces défauts repérés sont essentiellement au nombre de trois : la trop grande fragilité de la fixation du porte-enseigne, l’erreur d’orientation d’une console de pilier arrière de l’édicule A et le problème de l’accrochage des écussons sur la balustrade que nous développerons ici. Les écussons en fonte des balustrades ont une fonction d’obstruction de l’espace central des modules (afin que l’on ne bascule pas dans le vide de la trémie) et aussi une fonction décorative pour laquelle on n’est pas en peine de retrouver quantité d’analogies visuelles. Indépendants des arceaux et des potelets, ils ne participent pas à la structure de la balustrade. Au contraire, leur poids important (28,5 kg) nécessite qu’ils soient solidement fixés sur les fers qui ceinturent cette balustrade.
Pour cette balustrade, Guimard reprend le mode de fixation adopté cinq ans plus tôt pour les écussons fixés sur les balcons du Castel Béranger. Ceux-ci reposent sur des barres en acier grâce à des encoches ménagées à leur face postérieure et sont maintenus par des rivets.
Les fers des balustrades du métro sont des profilés en U et sont insérés dans des encoches ménagées à l’arrière des potelets. Ils sont au nombre de trois.
Les fers n° 1 (de section 30 x 20 mm) et n° 2 (de section 20 x 20 mm) sont plus larges et sont placés sur le même plan vertical, ce qui leur confère visiblement une fonction de soutien. Le fer inférieur (fer n° 3, de section 14 x 14 mm) est placé environ un centimètre plus en arrière (1). Sa position en retrait et sa faible section ne le désignent pas comme un élément porteur. Il contribue cependant à stabiliser la balustrade.
En observant les écussons, on comprend que leur décor n’est pas entièrement gratuit mais qu’il a une part fonctionnelle. On détecte très vite que Guimard a intégré dans leur modelage quatre emplacements de pré-perçage. Deux sont au niveau des « oreilles » de la partie supérieure.
Leur pré-perçage est plus visible à la face arrière.
Les deux autres points de pré-perçage sont au niveau des « pattes » de la partie inférieure.
De plus, à la partie inférieure de la face arrière, une petite proéminence est visiblement conçue pour reposer sur un fer et soulager ainsi les rivets qui supportent l’écusson.
Logiquement, la distance de 62 cm qui existe entre les pré-perçages hauts et les pré-perçages bas devrait correspondre à la distance entre les deux fers de soutien, le n° 1 et le n° 2.
Mais en réalité, elle correspond à la distance entre le fer n°1 et le fer n° 3, alors que ce dernier ne peut être utilisé pour supporter l’écusson.
C’est pourtant cette configuration qui est présente sur les dessins anciens connus de Guimard où figure une balustrade. Celui que nous reproduisons ici date de janvier 1902, à un moment où Guimard a pourtant dû adopter un autre type de montage. Mais il est identique dans son principe aux dessins de 1900.
Sur ce dessin les « oreilles » sont bien fixées sur le fer n° 1. En revanche, la fixation basse n’est pas bien mise en évidence car le dessin ne différencie pas les épaisseurs des différents fers.
Mais si l’on veut fixer les écussons grâce aux emplacements prévus sur leurs pattes, on est confronté à une impossibilité puisque le fer n° 3 est en retrait vers l’intérieur de la trémie. De plus, il est peu solide.
Donc dès le début de leur mise en place, en 1900, les écussons ont été remontés de quelques centimètres pour que les pattes inférieures soient rivetées sur le fer n° 2.
À sa partie supérieure, l’écusson est toujours fixé au fer n° 1, mais il n’est plus possible d’utiliser les emplacements prévus sur les « oreilles ». Il est donc nécessaire de percer l’écusson plus bas, de noyer les rivets dans l’épaisseur de la fonte puis de les masquer.
L’avantage de cette configuration « haute » est que la petite proéminence arrière repose alors sur le fer n° 2, plus solide que le fer n° 3. On peut penser que c’est pour cette raison qu’elle a été choisie.
Mais esthétiquement, elle a le désavantage de masquer en grande partie l’évidement situé à la partie supérieure de l’écusson par la présence du fer n° 1.
Alors que jusque-là tous les écussons avaient été installés selon la configuration que nous venons de décrire, en 1913, sur la ligne 10 — la dernière à recevoir des accès Guimard — deux entourages découverts, Chardon-Lagache et Porte d’Auteuil (2) voient leurs écussons montés conformément aux dessins anciens. Quelle est la raison de ce changement ? Simple erreur d’une nouvelle équipe de montage ? Volonté soudaine d’expérimenter cette autre configuration ? Nous ne le saurons sans doute jamais.
Cette fois, les pré-perçages des « oreilles » à la partie supérieure des écussons sont utilisés pour les fixer par rivetage sur le fer n° 1.
L’écusson se trouvant ainsi abaissé, les pré-perçages des pattes se retrouvent bien en face du fer n° 3, mais comme nous l’avons signalé plus haut, son retrait en arrière et sa faible section interdisent de l’utiliser comme soutien. Le rivetage de l’écusson se fera donc plus haut, en regard du fer n° 2 en noyant les rivets dans l’épaisseur de la fonte puis en les masquant.
Cette fois, la petite proéminence arrière se retrouve placée entre les fers n° 2 et n° 3, ce qui semble être son emplacement logique. Cependant le fer n° 3 ne peut offrir un soutien efficace.
Cette configuration « basse » offre cependant l’avantage de dégager l’évidement à la partie supérieure de l’écusson.
Comme aucune des deux configurations n’est satisfaisante et que toutes deux obligent à un perçage sans point de repère de la fonte de l’écusson, soit en haut soit en bas, suivi d’un masquage au mastic de la fixation par rivetage, il faut bien admettre que cette situation découle d’une erreur de conception. Et cette erreur se trouve non sur l’écusson, mais bien sur le potelet puisque ce sont les encoches à la partie arrière du potelet qui déterminent la position des fers. Pour que tous les critères de facilité de montage et de solidité soient réunis, il faudrait que les encoches des fers n° 2 et n° 3 soient inversées.
Reprenons depuis le début. Voici la position actuelle des 3 fers, imposée par les encoches au revers des potelets existants
Les « flammes » sont rivetées sur les fers n° 1 et n° 2, mais pas sur le fer n° 3 puisqu’il se trouve en retrait vers l’intérieur de la trémie.
Voici la configuration habituelle de fixation de l’écusson.
Ses pattes inférieures sont fixées sur le fer n° 2 et la fixation sur le fer n° 1 se fait à travers la masse de l’écusson.
À la station Chardon-Lagache, les fers sont disposés de la même façon.
Mais la CMP a choisi cette fois de fixer l’écusson plus bas…
… en rivetant les « oreilles » supérieures sur le fer n°1 et à la partie basse de l’écusson en perçant dans la masse pour le fixer au fer n° 2.
Envisageons maintenant d’inverser les positions des encoches des fers n° 2 et n° 3 sur les potelets qui seraient à présent disposés comme ceci…
Les « flammes » seraient alors rivetées sur les deux fers porteurs, c’est à dire sur le fer supérieur et le fer inférieur.
L’écusson serait enfin logiquement placé, avec le rivetage de ses « oreilles » sur le fer supérieur et le rivetage de ses pattes intérieures sur le fer inférieur. Quant à la petite proéminence à l’arrière de l’écusson, elle se retrouverait bien placée entre les deux fers du bas, tout en reposant sur le fer n° 2 qui est un fer porteur. De plus, l’évidement supérieur de l’écusson serait bien dégagé.
Voilà donc 119 ans que les équipes de la CMP puis de la RATP souffrent pour poser les écussons en perçant dans la masse de la fonte plus ou moins à l’aveugle à un emplacement qui n’était pas prévu pour cela…
Quand l’erreur de conception s’est révélée lors des premiers montages en 1900, il était trop tard pour relancer une production de potelets à la fonderie alors que l’erreur venait des dessins et des modelages de Guimard. En 1902, pour la ligne 2, il aurait sans doute été possible de modifier les potelets mais l’on a continué à travailler de la même façon, même si c’était malcommode…
F. D.
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Le bureau du Cercle Guimard
Pour débuter le mois de mars, le Cercle Guimard vous propose une nouvelle date de visite commentée : Montparnasse 1900, l’architecture des ateliers d’artistes.
Et à bientôt pour de nouveaux parcours…
Cet article développe et complète un aspect traité dans le livre Guimard l’Art nouveau du métro, paru en 2012 aux éditions La Vie du Rail. Un autre article est consacré plus spécifiquement aux entourages à trémies étroites.
Conçus pour être l’exception, les entourages découverts du métro parisien, dessinés par Hector Guimard en 1900, sont devenus — par la volonté des conseillers municipaux — de loin les plus nombreux, au détriment des édicules qui ont presque failli disparaître du réseau. Sans qu’il y ait de nécessité ou de désir clairement exprimé par les autorités municipales et préfectorales, Guimard conçoit ses entourages à fond arrondi (comme les édicules B) ou à fond orthogonal (comme les édicules A).
Sur les deux premiers chantiers du métro auquel il participe, Guimard est essentiellement confronté à des largeurs[1] de trémies de 3 m qui, dans le cas d’entourages à fond orthogonal, reçoivent à l’arrière trois modules d’un mètre. Mais quelques accès ont une largeur spécifique. L’un est plus étroit (2 m 75 à Bastille) et trois autres sont plus larges (3 m 50 à Palais Royal et à Père Lachaise) et même 4 m à Villiers (détruit).
Si l’élasticité du système modulaire de Guimard absorbe facilement l’augmentation de la largeur au niveau de la balustrade, en revanche, au niveau du portique des modifications sont nécessaires. Étant donné que Guimard conserve les mêmes modèles d’arches que pour les entourages de largeur standard à 3m (V-3b et V-4b), il est nécessaire de modifier les largeurs des deux pièces en fonte du porte-enseigne (V-5b et V-6b pour Palais Royal et Père Lachaise, V5c et V-6c pour Villiers).
Pour ces trois accès, Guimard conçoit aussi une enseigne en lave émaillée plus large avec un lettrage différent (« entourage petit M »).
Après l’arrêt de la collaboration de Guimard avec la CMP en 1903, la compagnie continue à utiliser largement ses modèles d’entourages découverts[2]. La plupart auront des dimensions de trémie « standard » permettant d’utiliser trois modules en largeur et cinq ou six modules en longueur. Tous sont à fond orthogonal, à l’exception des quatre entourages étroits de la station Strasbourg-Saint-Denis qui sont à fond arrondi (détruits).
Mais elle sera aussi confrontée à des trémies de largeurs très différentes. Pour certains accès, en fonction de l’espace disponible et de l’affluence attendue, les autorités prescrivent des trémies plus larges sur lesquelles il faut adapter les entourages Guimard. N’ayant ni le talent ni l’inventivité de l’architecte, les ingénieurs de la CMP modifient alors les fontes et les enseignes des portiques d’une façon parfois peu élégante. Dans tous les cas, les arches sont celles de l’entourage standard à trémie de 3 m (V-3a et V-4a). Mais les deux fontes des porte-enseignes doivent alors êtres adaptées par allongement de leur partie centrale : V-5g et V-6g pour une trémie de 3 m 30 ; V-5b et V-6b pour une trémie de 3 m 50 ; V-5c et V-6c pour une trémie de 4 m ; V-5h et V-6h pour une trémie de 4 m 50 ; V-5i et V-6i pour une trémie de 5 m ; V-5j et V-6j pour une trémie de 6 m.
Pour des largeurs de trémie de 3 m et de 3 m 30, les portiques reçoivent une enseigne « entourage grand M ».
À partir de 3 m 50, ils reçoivent une enseigne « entourage grand M », plus large, initialement conçue par Guimard pour les stations Palais Royal (3 m 50), Père Lachaise (3 m 50) et Villiers (4 m). Si ce type d’enseigne est encore harmonieux pour Villiers, il ne l’est déjà plus quand la trémie passe à 4 m 50 ou à 5 m, largeurs que Guimard n’a jamais eu à traiter.
L’entrée la plus large est à la station Nation avec une largeur de trémie de 6 m. Cette extrême largeur contraint à agrandir démesurément les fontes du porte-enseigne. L’existence de la carte postale ancienne ci-dessous prouve que la CMP s’est préoccupé de ce problème puisqu’elle a, dans un premier temps, mis en place une enseigne provisoire marquée « entrée du Métropolitain » de grande largeur, couvrant toute l’étendue du porte-enseigne.
Mais finalement, peut-être en raison du poids excessif qu’aurait pu avoir une telle enseigne réalisée en lave émaillée, elle s’est résolu à mettre en place une enseigne à lettrage « entourage petit M ». Il en résulte de grands vides particulièrement inesthétiques de part et d’autre de l’enseigne.
Il nous semble douteux que Guimard, s’il avait été chargé d’entourages d’accès d’aussi grandes largeurs, se fût contenté de cette solution de facilité consistant à élargir le porte-enseigne et aurait probablement modifié plus profondément le portique.
F. D.
[1] Dans tous les articles concernant le métro de Guimard, nous utilisons le terme « largeur » pour quantifier une distance face à l’observateur qui est situé en face de l’accès de métro (largeur de trémie, largeur de l’enseigne, etc). De même, les termes « gauche » et « droit » font référence au coté qui perçu par l’observateur situé en face de l’accès de métro.
[2] Tous sont à fond orthogonal, à l’exception des quatre entourages étroits de la station Strasbourg-Saint-Denis qui sont à fond arrondi (détruits).
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